La scène artistique arabe actuelle a considérablement évolué ces dernières décennies à l’intérieur du monde arabe et dans les pays européens où la diaspora a trouvé des espaces nouveaux d’expression. Les nombreuses catastrophes et crises sociales, politiques et économiques (dictatures, guerres civiles, terrorisme, révolutions, crises environnementales, famines, déplacements forcés) que le monde arabe a traversées, de la colonisation aux révolutions arabes de 2011 ou aux violences actuelles au Liban et à Gaza, sont à l’origine de plusieurs formes de traumatismes qui marquent durablement l’imaginaire collectif et affectent l’individu et la collectivité. Les discours dominants élaborés sur les traumatismes ont souvent pour effet de désubjectiver les victimes des traumatismes personnels et collectifs et de minimiser leur « agentivité » et leur capacité de résilience. A l’opposé, les pratiques artistiques actuelles visent, par le biais de la « mise en art » des divers chocs vécus, dans les pays arabes comme dans la diaspora, à déconstruire les discours désubjectivants,  à faire du traumatisme un instrument pour récupérer sa propre voix et sa propre visibilité (Maïdi Houari et Karavanova Elena, 2021).  

Les artistes contemporains, quel(s) que soi(en)t leur(s) domaine(s) d’expression, proposent une réinterprétation du traumatisme qui ramène le sujet au centre de la réflexion et reconnecte son expérience individuelle à la dimension collective, et par là-même, inventent de nouvelles formes d’engagement et d’être-au-monde. Au sein d’un champ artistique mondialisé, ils « restructurent l’ensemble social selon des principes et des finalités qui échappent en grande partie au politique.» (Kossov et al., 2023 : 19).